c. Hydrates de gaz

Hydrates Naturels

Les hydrates de gaz naturels sont des échantillons cristallins qui appartiennent à la classe des composés d’inclusions et renferment une quantité importante de gaz naturels comme le méthane, l’éthane, le dioxyde de carbone, etc. 

Ils se forment généralement lorsque l’eau se combine avec les gaz à haute pression et basse température. Les conditions favorables à leur formation en milieu naturels existent principalement dans les sédiments marins le long des marges continentales à des profondeurs importantes (300 – 3000 m) où règnent des conditions de pressions et températures conforment à leurs zones de stabilité thermodynamique. On répertorie également leur présence, dans une moindre mesure, dans les sols gelés des régions continentales polaires. Le méthane piégé dans ces hydrates provient de sources biogéniques (bactéries) ou « méthanogéniques » (méthane primordial). Les propriétés physiques des hydrates de gaz naturels sont importantes pour développer des technologies pour leur exploitation ou pour établir leur taux de formation/dissociation et leur zone de stabilité. 

 Ce projet a pour objectif l’analyse de la structure, composition et stabilité des hydrates de gaz naturels. Les échantillons naturels d’hydrate de gaz sont extraits de sédiments marins récupérés lors de campagnes de forage en mer : bassin Congo-Angolais, marge Norvégienne, mer de Marmara. Bien que les quantités de gaz naturels présents sous forme hydrates ne sont pas, pour l’heure, connues avec précision, on estime que les hydrates de méthane formés au fonds des océans contiennent au total deux fois plus de carbone organique que la totalité des gisements de gaz naturel, de pétrole et de charbon répertoriés. Ces composés représentent aux yeux de beaucoup et notamment pour l’industrie du gaz un intérêt en tant que source d’énergie future potentiellement exploitable. En revanche, ils constituent un risque majeur pour l’environnement en cas de décomposition massive, en raison des quantités abondantes de méthane susceptible d’être libérées dans l’atmosphère et dont la particularité est de pouvoir exercer un effet de serre 30 fois supérieur à celui du dioxyde de carbone.

Hydrates de gaz collectés en Mer Noire (2016) (collaboration Ifremer Brest-PhLAM)


Ce projet démarré dans le cadre d’une thèse sur « les hydrates naturels de méthane » (thèse co-dirigée Ifremer-PhLAM, C. Bourry 2008) se poursuit actuellement sous la forme d’une collaboration avec l’Ifremer (Dr. L. Ruffine) pour l’analyse de la structure et du domaine de stabilité des hydrates. Par ailleurs une action COST (ES1405) a été mise en place depuis 2015 pour structurer la recherche européenne sur les hydrates de gas naturel (https://www.migrate-cost.eu/), en fédérant les institutions scientifiques (20 laboratoires de 14 états membres) autour de ce thème jugé prioritaire par l’union européenne. Un rapport mettant à jour l’état de l’art sur les hydrates marins et la technologie de récupération du gaz naturel a été publié suite à cette action : Marine gashydrate technology: state of the art and future possibilities for Europe (WP2 report 2017) : Lien 

Applications des hydrates au captage du CO2

L’étude du procédé de captage de dioxyde de carbone par cristallisation d’hydrates a été initiée lors du projet ANR-SECOHYA 2008-2011 et se poursuit actuellement dans le cadre du nouveau CPER CLIMIBIO (2014-2020) et du projet Européen INTERREG-2MERS-CARBON2VALUE (https://www.carbon2value.be/en/).

CONTEXTE
Le dioxyde de carbone est un important gaz à effet de serre (GES) reconnu en tant que contributeur majeur dans l’aggravation de la situation climatique due au réchauffement climatique. En raison de l’émission annuelle d’énormes quantités de CO2 (31,6 Gt) dans l’atmosphère, dont 8,6 Gt de carbone proviennent de la combustion de combustibles fossiles dues aux activités anthropiques, il est prévu que la concentration globale actuelle de CO2 de 395 ppm1 continue d'augmenter rapidement d'ici à 2100. 

Dans l’éventail des solutions permettant la réduction des GES, la capture et séquestration du CO2 (CCS) constituent une solution efficace à court et moyen terme, qui doit être considérée comme une technique de transition permettant de gagner du temps dans la lutte contre le réchauffement climatique. En effet, l’urgence climatique nécessite des actions immédiates de réductions des émissions de GES. Or les usages concentrés d’énergie fossile très émetteurs de CO2 (centrales électriques, aciéries, sidérurgies, raffineries) représentent à eux seuls presque la moitié des émissions totales de CO2 d’origine fossile. Sachant d’autre part que les réserves fossiles, notamment en charbon sont encore considérables, on peut raisonnablement douter de la disparition rapide de ces sources très émettrices de CO2. La CCS apparaît ainsi comme une solution transitoire permettant de mettre en place des mesures plus durables associées à l’efficacité énergétique et aux développements d’énergies renouvelables. 

Aujourd’hui, la CCS est en plein développement et de nombreux projets sont à l’étude. Des installations de démonstration commencent à voir le jour (Schwarze Pumpe en Allemagne, K-12B au Pays-Bas, Statoil Hydro en Norvège etc.). L’étape de capture du CO2 est particulièrement stratégique puisqu’elle représente environ 75% du surcoût engendré par la CCS. L’un des objectifs majeurs des acteurs de la filière est donc de réduire les coûts de la capture du CO2, et rendre ainsi financièrement acceptable l’équipement des unités très émettrices de CO2. 

 

OBJECTIF DU PROJET C2V INTERREG2Mers:
Plusieurs technologies conventionnelles de captage du CO2 en « post-combustion » sont opérationnelles dans le commerce depuis plus de 50 ans, mais des analyses récentes ont toutefois montré que ces technologies accroissent les besoins en énergie des centrales de 25 à 40% pour fonctionner correctement, alors que les recommandations actuelles devraient être fixé à une surconsommation plutôt autour de 3.5%. Comme le coût de la phase de capture du CO2 représente les deux tiers du coût total d’une opération captage + stockage, les méthodes de capture existantes ne sont de toutes évidences pas rentables pour remédier aux émissions de dioxyde de carbone. La concentration de CO2 des effluents gazeux est généralement de 3 à 15% pour les centrales électriques (ou au charbon) et jusqu’à 40% dans les usines de fabrication de l’acier, ou encore dans certains cas, pour la production et séparation de gaz naturel. 

Le projet que nous développons propose une voie innovante basée sur la formation d’hydrates dont le concept consiste à capter le gaz dans une structure cristalline solide constituée de cages de molécules d’eau (clathrates), et à tirer profit de la sélectivité de l’enclathratation des gaz dans cette structure pour capter préférentiellement un gaz (CO2 mais également CO) par rapport aux autres gaz (typiquement N2). Les hydrates de gaz ainsi formés (d’apparence de la glace) se composent de la combinaison de molécules de gaz et d’eau dans des conditions thermodynamiques particulières de fortes pressions et basses températures.

Par rapport à une technologie aux « amines », actuellement appliquée aux stations d’alimentation de gaz de combustion ou de charbon, ce concept vise à réduire le coût de fonctionnement d’un facteur 2. Cela signifie un fonctionnement avec un coût opératoire total inférieur à 2KJ/kg CO2.

RESULTATS 
Des additifs thermodynamiques sont sélectionnés pour produire des semi-clathrates et réduire la sévérité des conditions de formation d’hydrates dont le cout énergétique peut être un frein au développement du procédé. Ces semi-clathrates viennent de démontrer leur potentialité pour se former dans des conditions modérées et affichent une sélectivité compétitive et une capacité de capture plus faible que celle des hydrates à base d'eau (Rodriguez et al., Chem. Eng. J., 382, 122867 (2020)). Notre étude s'intéresse désormais au procédé de séparation avec CO pour déterminer expérimentalement les conditions optimales de formation d’hydrates, la pression de fonctionnement et mesurer la sélectivité des gaz."

Clathrate Hydrates pour la capture et séquestration du CO2 (CCS)

Approche multi-échelle de l’impact d’impuretés minérales sur le piégeage de gaz dans des clathrates hydrates

Les clathrate hydrates sont des solides cristallins nanoporeux, constitués de cages aqueuses encapsulant des espèces moléculaires (gazeuses). Depuis leur découverte il y a environ deux siècles, ces systèmes ont connu un intérêt croissant, allant de la « simple curiosité » scientifique à leur problématique d’ingénierie liée à l’obturation des gazoducs et oléoducs. 

Du fait de leur occurrence terrestre, les clathrate hydrates représentent une opportunité en tant que nouvelle source énergétique pour le futur. Ils jouent également un rôle clef dans les scénarii de formation planétaire et cométaire. Une observation commune aux clathrate hydrates d’origine terrestre et extraterrestre, est qu’ils sont principalement et naturellement formés en présence de poussières de glace poreuses, pouvant être enrichi en minéraux, sels et/ou sédiments hydratés ou aux interfaces géologiques océan/couche sédimentaire. L’impact de ces impuretés minérales sur les propriétés physico-chimiques des clathrate hydrates (sélectivité des gaz piégés, stabilités, cinétique de formation, etc…) constitue un enjeu primordial pour suivre l’évolution de l’abondance des espèces participant à la composition des dépôts d’hydrates sur Terre et dans les corps extraterrestres.

Domaines d’existence avérés ou potentiels d’hydrates de gas

La morphologie et la distribution des clathrate hydrates dépendant des propriétés de leur milieu naturel (composition chimique, hydrophobicité, porosité…), la compréhension, à un niveau fondamental, de la sélectivité moléculaire, de la thermodynamique, des mécanismes de formation et de dissociation sur et au sein de minéraux est cruciale. 

 Le projet ANR MI2C (http://mi2cproject.wixsite.com/pages) s’inscrit dans ce cadre de recherche fondamentale et vise à : (i) développer de nouveaux clathrate hydrates en présence d’impuretés minérales pour mimer leurs environnements naturels (e.g. corps planétaires et cométaires, océans profonds, pergélisol d’origine terrestre et extraterrestre) et (ii) étudier les facteurs pilotant la sélectivité des gaz piégés et les mécanismes de formation/dissociation de tels systèmes. Le projet englobe donc l’étude de clathrate hydrates mixtes dans des conditions thermodynamiques pertinentes pour des environnements géologiques et astrophysiques, et permettra d’explorer l’influence de substituts mésoscopiques présents dans ces milieux naturels lors de la formation de clathrate. Cet objectif constitue la principale nouveauté du projet. Pour mener à bien ces recherches, les partenaires impliqués proposent une approche pluridisciplinaire originale et se basant sur des expertises théoriques et expérimentales. Le programme de recherche présente un caractère fortement multi-échelle allant des approches atomiques (par exemple, dynamique moléculaire classique et ab-initio, simulation Monte Carlo, diffusion neutronique) à des études microscopiques (micro-spectrométrie et imagerie Raman, modélisation mésoscopique et simulation statistique). Ce projet innovant amènera de nouvelles perspectives fondamentales dans des domaines allant de la physico-chimie (impact de défauts sur les lois thermodynamiques classiques) à l’astrophysique ou la géophysique (modèle « réaliste » d’observation des clathrates en conditions terrestres et "extra-terrestres").

Depuis quelques années, la communauté « hydrates » manifeste une volonté de combiner leurs compétences aux travers de projets ANR (SECOHYA, MI2C, HYDRE, CRISALHYD, HYDFECT), de projets européens (projet MIDAS, action-COST MIGRATE, ERC-EXOWATER, INTERREG-2MERS-CARBON2VALUE), de CPER (CLIMIBIO) et d’implications dans des pôles de compétitivité ou des structures de transfert de technologie (Inter-­Carnot energICs, Axel’One de la région Aura, Aquitaine Science Transfert), et des instituts CARNOT (M.I.N.E.S, IRSTEA, BRGM, ISIFoR). 

Pour formaliser ces intérêts communs et partages de compétences, la communauté a récemment créé un Groupement De Recherche (GDR) pour mieux échanger, s’organiser au niveau national et renforcer sa visibilité au niveau européen. Nous sommes membres partenaires de ce GDR  Le GDR Hydrates (http://hydrates.cnrs.fr/) est structuré en quatre pôles : un pôle « Sciences moléculaires» qui abordera les questions fondamentales liées aux hydrates, autour duquel graviteront trois pôles à vocations plus appliquées « Astrophysique », « Géosciences » et « Génie des procédés et Technologies ». De plus, la communauté de chercheur attenante au GDR s’appuiera sur des compétences expérimentales et théoriques. Les équipements mis en jeu seront clairement affichés par l’intermédiaire de deux «plateformes virtuelles », dressant l’inventaire des outils de modélisation (allant de la thermodynamique classique à la dynamique moléculaire) et des dispositifs expérimentaux disponibles (de l’échelle moléculaire à l’échelle géologique).

Image en microscoppie optique de la cristallisation d’un hydrate