b. Propriétés glaciogènes dans l’atmosphère

Les émissions de particules solides (suies) issues de la combustion incomplète de matière fossile ont potentiellement, avec les aérosols biologiques, un effet considérable sur le climat de par leur pouvoir glaciogène qui peut influencer la formation des nuages et les phénomènes de précipitation. Les trainées de condensation (particules de glace) s’observent lors du passage répété des avions dans une atmosphère suffisamment froide et humide. Ces particules de glace subsistent lorsque l’air est suffisamment chargé en humidité et peuvent évoluer en voile persistant prenant la forme de cirrus artificiels. Leur origine est octroyée aux aérosols de suie émis par les moteurs d’avion en raison de leur capacité à promouvoir la formation de glace (bon agent glaciogène). Ces modifications de la couverture nuageuse sont une contribution possible de l’aviation au réchauffement climatique.

Les processus de formation de ces phénomènes nuageux restent encore mal compris, ainsi que l’ampleur de leur impact sur le climat. La forme et la rugosité des particules de glace formées peuvent également avoir un impact important sur les propriétés radiatives des nuages, les particules rugueuses pouvant réfléchir de manière plus importante les radiations solaires comparé à des cristaux lisses. 

Dès lors, pour apporter à la communauté des résultats significatifs et cohérents, il est important de pouvoir mener une étude complète utilisant une technique de nucléation spécifique et faisant intervenir à la fois des particules de suies analogues à celles délivrées par les réacteurs d’avions mais également des particules originales issues de ces dit moteurs. Cette étude pourra, une fois achevée, établir la relation entre les propriétés physico-chimiques des particules et leur hygroscopicité observée lors de la nucléation. 

Exemple de trainée de condensation observée en sortie de réacteur d’avion

Ces travaux de recherche ont débuté dans l’équipe PMI sous l’impulsion du Réseau Thématique Aéronautique et Environnement (RTAE) du CORAC (Conseil pour la recherche aéronautique civile française) dans le cadre du projet MERMOSE (2012-2015). Ce projet avait pour but de faire avancer la recherche sur les traînées de condensation et les cirrus générés par le trafic aérien en altitude, en raison de la modification de la couverture nuageuse qui peut être une contribution possible de l’aviation au forçage climatique. Ce thème d’étude et notre expertise dans le domaine de l’analyse de composition de surface d’aérosols par désorption laser nous ont également conduit à intégrer le Labex CaPPA (2012-2019), dans lequel nous intervenons dans la formation et la recherche au sein de deux work packages : WP2-Propriétés physiques, chimiques et optiques des aérosols et WP5-Contributions à l’étude des interactions Aérosols/Nuages/climat. 

Nous cherchons donc à évaluer l’influence de la présence de molécules organiques et particules de suies sur les processus de nucléation de la glace dans des conditions de pression, température et humidité analogues à celles pouvant être présentes dans la haute troposphère. Pour cela, nous avons cherché à atteindre les objectifs suivants :

Schéma du dispositif expérimental IDroNES (Ice and Droplet Nucleation Experimental Setup) utilisé pour l’étude de la nucléation en mode dépôt.

1. Construire un dispositif expérimental permettant de mener une étude complète de nucléation de particules de glace ou gouttes par dépôt gazeux sur des suies de nature et de composition surfacique différentes bien caractérisées (tâche terminée) ;

Exemple d’images prises au microscope montrant la nucléation de cristaux de glace (T=45°C) ou de gouttelette (-15°C) dans l’instrument IDroNES sur des surfaces présentant des défauts structurels ou d’aspect lisse au niveau macroscopique.

2. Déterminer les mécanismes et les conditions cinétiques et thermodynamiques de nucléation et croissance de la glace sur les particules de suie en fonction de leurs caractéristiques physiques (structure, texture) et chimiques (composition chimique élémentaire et fonctionnelle) (tâche en cours) ;

3. Comparer les paramètres gouvernant la nucléation de cristaux de glace en mode dépôt de vapeur à ceux observés comme prépondérant en mode immersion (lorsque la particule ou l’impureté est immergée dans une micro gouttelette d’eau avant cristallisation) (tâche en cours);

4. Fournir lorsque possible des données spécifiques d’intérêt pour la modélisation de l’impact des trainées de condensation sur le climat (tâche en cours). 

Relation entre les données expérimentales pouvant être extraites de nos expériences (cadres à fond blanc) et leur analogue en modélisation (cadres à fond vert).