a. Aérosols naturels ou anthropiques: caractérisation de surfaces

Dans ce projet, la nanostructure et composition de surface des aérosols anthropiques ou naturels sont caractérisées pour déterminer la nature et évaluer la quantité de composés moléculaires qui composent leurs surfaces. Parmi les nombreux composés détecté sur ces surfaces complexes, on peut citer par exemple les hydrocarbures aromatiques polycycliques, les métaux, le soufre, ou encore les composés contenant de l’oxygène (liste non exhaustive). Cette information sur la composition chimique est primordiale pour mieux comprendre l’évolution atmosphérique des particules (vieillissement, activité de noyaux de condensation, etc.), ce qui permet d’évaluer leur impact global sur l’environnement et également guider les décideurs sur l’instauration de mesures et régulations des émissions de particules. 

Le LABEX CaPPA (2012-2019) et le projet MERMOSE (2012-2015) ont orienté nos recherches vers l’étude des particules émises dans les gaz d’échappement lors de la combustion incomplète de carburant, et ce dans différents réacteurs/moteurs (brûleurs de laboratoire, réacteurs aéronautique, moteurs de véhicules) avec pour objectif premier de caractériser la composition et la nanostructure de la surface de ces particules. Une fois ces données connues, il devient possible de mettre en évidence les paramètres influençant la composition et /ou la nanostructure lors de la formation des suies (carburant, additifs, vitesse du moteur, usure mécanique du moteur, etc.). 

Notre effort continu de développement instrumental depuis 15 ans pour améliorer les performances de nos différentes méthodes analytiques de caractérisation de surfaces (désorption et ionisation laser couplée à la spectrométrie de masse notamment) nous permet d’obtenir actuellement des limites de détection extrêmement faibles (de l’ordre d’attomol par pulse laser, voir Faccinetto et al., Envion. Sci. Technol. 49, 10510, 2015 par exemple) qui, non seulement, rendent exceptionnellement performantes ces techniques d’analyse de surfaces, mais également, permettent une ouverture vers d’autres champs d’application où ces limites extrêmes sont nécessaires. Très récemment (décembre 2017), un nouveau spectromètre de masse à haute résolution a été intégré à notre schéma de désorption laser multi-longueur d’onde préexistant au CERLA (Centre d' Etudes et de Recherches Lasers et Applications), ce qui devrait encore améliorer ces limites de détection, et permettre de gagner plus d’un ordre de grandeur en résolution.

La plupart de nos systèmes expérimentaux a été développée spécialement pour l’étude des particules de suie provenant de projets étudiant : 

  • les flammes de laboratoire (projets LABEX CaPPA et CPER CLIMIBIO, en collaboration avec le laboratoire PC2A (UMR8522) dans le cadre du CERLA  (Irimiea, C., et al., Rapid Commun. Mass Spectrom., 32, 1015, 2018), 
  • les moteurs d’avion (projet national MERMOSE) (Parent, P., et al., Carbone, 101, 86, 2016),
  • les véhicules à moteur (projet BIOTOX, collaboration avec la République tchèque & Fédération de Russie).  

Le projet MERMOSE (ONERA, SNECMA/SAFRAN, IRSN, CINAM Marseille, CORIA Rouen, PhLAM & PC2A Lille) financé par le DGAC a été un grand succès et s’est vu remettre la médaille de l’Académie de l’air et de l’espace en 2014. La reconnaissance internationale de notre équipe dans ce domaine de la caractérisation de surfaces complexes a impulsé notre participation au projet européen PEMs4Nano H2020 (2016-19, www.pems4nano.eu), où avec l’Université de Cambridge nous sommes les seuls partenaires académiques dans un consortium composé de 7 partenaires industriels. Notre objectif dans ce projet est de caractériser les particles de suie (morphologie, composition chimique de surface) émises par les moteurs de voitures en condition réelles de fonctionnement, de manière à pouvoir dériver une technologie de mesure des particules qui soit reproductible,  robuste, et possédant une très faible limite de détection.

Technique de désorption laser couplée à l’analyse en masse pour caractériser la phase adsorbée (hydrocarbures aromatiques polycycliques - HAP) des suies de combustion. développé au PhLAM (gauche et milieu) et principe de la spectrométrie Raman (droite).

La spectroscopie Raman est une technique largement utilisée pour la caractérisation structurelle des matériaux carbonés, qu’ils soient de structure cristalline ou de structure très désordonnée telle que la suie, en raison de sa sensibilité au type de structure cristalline mais aussi à l’arrangement moléculaire dans ces structures, c’est-à-dire au degré de désordre structurel (identification des défauts de structure). Une des caractéristiques principales des matériaux carbonés est liée à la présence des bandes Raman G et D, identifiées dans les travaux pionniers de Tuinstra et Koenig (1970). Ainsi, les variations dans les positions, les intensités, les largeurs de ces bandes caractéristiques ont été étudiées en détails et corrélées au degré d’ordre en combinant d’autres techniques d’analyse comme la diffraction des rayons X, la microscopie électronique ou encore les mesures diélectriques. Un fois enregistrés, les spectres Raman peuvent être déconvolués pour évaluer les paramètres spectraux significatifs (position des bandes, largeur à mi-hauteur des bandes, rapport d’intensité intégrée des bandes) des variations structurelles et/ou chimiques de ces composés. Le but étant d’extraire des informations structurelles que l’on pourrait corréler avec les propriétés hygroscopiques (activité glaçogène) des suies (voir activité (a)). Des corrélations apparaissent entre les variations spectrales et la microstructure/nature chimique des composés carbonés en fonction des conditions de combustion et de formation des suies. 

Par ailleurs, nous sommes membres participant des GDR (3622) SUIE (http://suie.utinam.cnrs.fr/spip.php?article92) et EMIE (https://www-liphy.ujf-grenoble.fr/emie/intro.htm) qui ont pour vocation de rassembler le plus largement possible la communauté des chercheurs français s’intéressant directement ou plus ponctuellement à (i) l’objet "suie", avec comme objectif de dépasser les limitations actuelles dans la connaissance des suies et de diminuer les incertitudes qui sont aujourd’hui un obstacle à notre compréhension de leur impact sur le climat (GDR SUIE), et (ii) aux Edifices Moléculaires Isolés et Envrionnés (EMIE).